Le blogue du Bioparc

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Qui est-ce qui pue?

L’homme utilise ses cinq sens bien différemment des animaux. Il profite de son ouïe pour entendre une jolie mélodie, de son odorat pour sentir des biscuits aux brisures de chocolat qui cuisent dans le four, de son goût pour déguster une glace à la vanille, de sa vue pour admirer des paysages grandioses et de son toucher pour flatter son meilleur ami le chien. Certains de ses sens sont plus développés que d’autres et la sensibilité de chacun est différente d’une personne à l’autre. Mais qu’en est-il des animaux?

 

Les animaux utilisent leurs sens pour la survie. Les différents sens leur permettent de trouver leur nourriture, éviter des prédateurs, trouver un partenaire sexuel, etc. Tout comme chez les humains, chaque espèce animale a un ou des sens plus développés que d’autres, en fonction de ses besoins. Les oiseaux de proie ont une acuité visuelle plus fine que l’homme, très utile pour la chasse rapide. Les chauves-souris ont une ouïe très développée leur permettant de faire de l’écholocalisation, soit d’émettre des sons aigus et d’entendre l’écho afin de localiser proies, prédateurs et obstacles. Les vaches ont un grand nombre de papilles gustatives, leur permettant de détecter les plantes potentiellement nocives, contenant des toxines par exemple. Les ratons laveurs ont les pattes avant très sensibles, couvertes d’une mince couche cornée et de vibrisses (poils sensitifs), qu’ils utilisent pour trouver et tâter leur nourriture.

 

Un sens très utilisé dans le règne animal est l’odorat. Celui-ci est l’analyse des substances volatiles présentes dans l’air. Ce sont des terminaisons olfactives, retrouvées dans le nez ou le museau, qui captent les substances et envoient l’information au cerveau pour analyse. Le nombre de terminaisons olfactives influence la capacité à sentir des animaux. L’homme en a entre cinq et six millions de terminaisons. Le chat en possède 67 millions. Les bergers allemands et labradors possèdent entre 150 à 200 millions de récepteurs. L’odorat du loup lui permet de sentir ses proies jusqu’à trois kilomètres, dans les bonnes conditions atmosphériques. L’ours noir peut sentir de la nourriture à 30 kilomètres.

 

En plus de détecter les odeurs grâce à leur odorat, plusieurs animaux produisent des odeurs. Le premier animal qui nous vient en tête en pensant odeurs est la moufette rayée, mais elle n’est pas la seule à utiliser ce type de communication. En fait, la plupart des animaux utilisent, à différents niveaux, les odeurs. Les signaux peuvent être de nature sexuelle, permettant à un individu d’annoncer aux membres de son espèce qu’il est prêt à se reproduire. Ils peuvent être des signaux de détresse, exprimant la peur ou le stress. Dans le cas de la moufette, il s’agit d’un signal d’avertissement, pour repousser un prédateur. Beaucoup d’animaux utilisent les odeurs pour marquer et délimiter leur territoire. Finalement, en mourant, les animaux dégagent une odeur, un signal de mort, qui attire les nécrophages vers les cadavres.

 

La moufette rayée a souvent mauvaise réputation à cause de l’odeur qu’elle laisse traîner derrière elle. Cette odeur est en fait du musc, un liquide épais et visqueux qui est produit par des glandes près de sa queue. Lorsqu’elle se sent menacée, la moufette va essayer de se sauver ou elle va gronder, siffler, taper rapidement des pattes avant, elle peut même marcher sur celles-ci, sur une courte distance, la queue dressée dans les airs. Si le prédateur ne s’en va pas, elle va utiliser son musc. Mais elle l’utilise en dernier recours seulement, puisque le musc est produit très lentement. Elle peut le projeter jusqu’à six mètres et il sent si fort qu’il peut être perçu sur près d’un kilomètre.

 

Longtemps incluse dans la famille des mustélidés, la moufette rayée a été changée de famille, suite à des analyses génétiques. Elle fait maintenant partie des méphitidés. Mais les mustélidés aussi produisent du musc. Les loutres de rivière, les belettes et les carcajous, pour nommer que ceux-là, ont des glandes près de la queue et se servent du musc pour marquer leur territoire et pour signaler leurs intentions lors de la reproduction.

 

Les canidés aussi utilisent les odeurs pour marquer leur territoire. Il suffit de penser aux chiens, qui s’arrêtent devant chaque poteau pour y faire un petit pipi et couvrir l’odeur d’un chien passé par là il y a quelque temps. Un autre bon exemple est le renard roux, qui possède des glandes au niveau des orteils, de la gueule et de la queue. En grattant le sol, en se frottant sur des arbres et en faisant leurs besoins, il marque son territoire et communique avec les autres renards, surtout en période de reproduction.

 

Le castor d’Amérique est un autre animal produisant des odeurs. Ces sécrétions huileuses sont appelées castoréum. Le castor l’utilise pour marquer son territoire, pour s’identifier et aussi pour imperméabiliser sa fourrure. L’homme utilise le castoréum en parfumerie et comme «saveur naturelle» pour remplacer la vanille, entre autres.

 

Finalement, l’opossum d’Amérique, connu pour son comportement particulier lorsqu’il se sent menacé, dégage une odeur lorsqu’il fait le mort. Cette odeur putride rappelle les animaux en décomposition, ce qui repousse plusieurs prédateurs.

 

Les mammifères mentionnés ne sont pas les seuls à produire des odeurs. La majorité des mammifères utilise d’une façon ou d’une autre les odeurs. D’ailleurs, ils ne sont pas les seuls à produire des odeurs pour communiquer. Plusieurs espèces d’insectes, comme les punaises et les coccinelles, utilisent les odeurs désagréables pour repousser les prédateurs. Certaines plantes utilisent même les odeurs pour attirer les insectes. C’est le cas, entre autres, du chou puant, qui dégage une odeur fétide pour attirer les pollinisateurs. Alors, même si beaucoup d’odeurs produites par les plantes et les animaux nous répugnent, celles-ci sont vitales dans la vie des êtres vivants.

 

L’homme, avec le temps, a changé sa façon d’utiliser les odeurs. Nous ne sommes plus capables, du moins pas consciemment, de détecter les phéromones, hormones volatiles produites pour la reproduction. L’homme utilise plutôt des produits pour cacher les odeurs ou encore du parfum pour changer son odeur. On est bien loin de l’utilisation de nos odeurs corporelles pour marquer notre territoire.

 

Auteure : Stéphanie Bentz, biologiste responsable de l’éducation