Le Québec abrite dix espèces de hiboux et de chouettes, tous regroupés dans la famille des strigidés. De la rare chouette lapone au harfang des neiges de l’Arctique, en passant par le très commun grand-duc d’Amérique, ils ont des tailles, des patrons de couleurs et des habitats très variés. Tous sont maîtres dans l’art du camouflage, rendant leur observation difficile. La petite nyctale est particulièrement bonne pour échapper aux regards.
La petite nyctale est la plus petite chouette du Québec, avec une longueur de 20 centimètres et une envergure moyenne de 45 centimètres. Son plumage est brun tacheté de blanc et sa poitrine est blanche rayée de brun. Elle a de grands yeux jaunes, un bec foncé et un X blanc au milieu du visage. Ce X est d’ailleurs très visible chez les jeunes, ce qui pourrait aider les parents à les nourrir.
Bien qu’elle soit une des chouettes les plus communes des forêts conifériennes de l’Amérique du nord, elle est difficile à observer. Sa petite taille, ses couleurs cryptiques et ses activités nocturnes sont d’autant de raisons qui la rendent si discrète. La meilleure façon de la détecter est par son chant, le « too-too-too », qui peut être entendu de janvier à mai. Ce chant, qui rappelle un peu une grenouille, est utilisé par le mâle pour délimiter son territoire. Celui-ci peut être entendu à près d’un kilomètre ! La femelle utilise aussi sa version du chant pour répondre au mâle durant la parade nuptiale.
La parade nuptiale est composée de chants par le mâle, puis par la femelle qui lui répond. Monsieur fait ensuite une vingtaine de tours en vol autour d’elle, avant de se poser, tout près, avec une proie en cadeau. Habituellement monogame le temps d’une saison de reproduction, il arrive que le mâle ait plusieurs partenaires lorsque les proies sont abondantes. La femelle choisit l’emplacement du nid, parfois aidée par le mâle. Les cavités des arbres morts et les anciens nids de pics bois sont parfaits pour pondre les œufs. Les nichoirs installés par les humains sont aussi une option. Une fois le premier œuf pondu, la femelle reste au nid pour la couvaison. Les cinq ou six œufs, en moyenne, sont pondus à intervalles de 48 à 72 heures. Après une incubation d’une vingtaine de jours, la femelle reste au nid jusqu’à ce que le plus jeune ait 18 jours. Elle quitte ensuite le nid et c’est le mâle qui continue à apporter la nourriture aux petits. Le départ de la femelle se fait rapidement sentir. Tant qu’elle est au nid, elle le garde très propre. Mais une fois la femelle partie, s’accumulent dans le nid excréments, boulettes de régurgitation et parties de proies en décomposition. Heureusement, les petits quittent le nid à l’âge de 27 à 36 jours, après quoi ils restent dépendants des parents pendant quatre à huit semaines.
Dès la naissance, les petits s’alimentent comme les adultes. Le régime alimentaire est principalement composé de petits rongeurs, surtout des souris du genre Peromyscus, dont font partie les souris sylvestres et les souris à pattes blanches. D’autres petits mammifères, comme les musaraignes, campagnols et chauves-souris, complètent son alimentation. Considérant sa petite taille, la petite nyctale mange généralement sa souris en morceaux, étalés sur deux repas.
La petite nyctale a une cousine qui lui ressemble passablement, la nyctale de Tengmalm. Elle est un peu plus grande d’environ cinq centimètres et son envergure est en moyenne de 58 centimètres. Mise à part la taille, c’est son disque facial blanc grisâtre bordé de brun, ses toutes petites taches blanches sur la couronne et son bec clair qui la distingue de la petite nyctale. Les habitudes de vie et d’alimentation sont semblables chez les deux espèces, hormis la distribution de la nyctale de Tengmalm qui est plus nordique que la petite nyctale.
De par leur habitude à nicher dans le creux des arbres, ou encore dans les trous de pics bois, les deux espèces de nyctales sont dépendantes des arbres matures et des chicots. La perte d’habitat, en raison de la coupe forestière, est donc une menace potentielle pour les nyctales. Bien que commune et répandue, le mode de vie discret de la petite nyctale rend les suivis de populations et de tendances démographiques difficiles. Les relevés normalisés comme le recensement des oiseaux de Noël sont très peu efficaces pour le décompte des nyctales. Les suivis doivent se faire via des décomptes spécifiques. Dans le cas de la nyctale de Tengmalm, sa distribution nordique rend les suivis encore plus complexes.
Ces petites chouettes restent bien mystérieuses et énigmatiques pour la majorité des observateurs d’oiseaux. Il arrive, à l’occasion, qu’un chanceux en aperçoive une pendant son repos diurne. Il est alors primordial de respecter l’éthique de l’observation des oiseaux. Il faut respecter l’oiseau et son environnement, en évitant de le déranger, entre autres. Bonne observation !
Photos de gauche à droite : petite nyctale, nyctale de Tengmalm
Auteure : Stéphanie Bentz, biologiste responsable de l’éducation et de l’interprétation
Sources :
UQROP. Petite nyctale [En ligne] https://www.uqrop.qc.ca/upload/files/oiseaux-quebec/strigidae/PN.pdf (Page consultée le 6 février 2023)
All about birds. Northern Saw-whet owl [En ligne] https://www.allaboutbirds.org/guide/Northern_Saw-whet_Owl/overview (Page consultée le 6 février 2023)
Audubon. Northern Saw-whet Owl [En ligne] https://www.audubon.org/field-guide/bird/northern-saw-whet-owl (Page consultée le 7 février 2023)
Gouvernement du Québec. Pleins feux sur… la recherche et la nyctale de Tengmalm [En ligne] https://mffp.gouv.qc.ca/jeunesse/recherche-nyctale-tengmalm/ (Page consultée le 8 février 2023)
All about birds. Boreal owl [En ligne] https://www.allaboutbirds.org/guide/Boreal_Owl/overview (Page consultée le 9 février 2023)
Audubon. Boreal owl [En ligne] https://www.audubon.org/field-guide/bird/boreal-owl (Page consultée le 9 février 2023)